Arrêtez l’expansion des plantations au Mozambique !


Demande de soutenir les communautés du Mozambique qui sont confrontées à l’expansion rapide des plantations industrielles d’arbres dans leurs territoires, sous l’impulsion de deux entreprises en particulier :
la société norvégienne Green Resources et la société portugaise Portucel / The Navigator Company.

Nous vous demandons de soutenir ces combats en signant la pétition ci-dessous et en l’envoyant à Mozambique@wrm.org.uy, en précisant votre nom, celui de votre groupe ou organisation, et celui de votre pays.

Nous vous serons reconnaissants de bien vouloir faire circuler cette information.

L’équipe du WRM

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Destinataires :
Green Resources
À l’attention de M. Mads Asprem, Directeur général
The Navigator Company / Portucel Mozambique
À l’attention de M. Diogo da Silveira, Président du Comité exécutif
Ministère du Territoire, de l’Environnement et du Développement rural du Mozambique
À l’attention de Monsieur le Ministre, M. Celso Correia
Ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire du Mozambique
À l’attention de Monsieur le Ministre, M. José Pacheco

Les pays de l’Afrique de l’Est et du Sud sont de plus en plus convoités par les entreprises et les investisseurs financiers du Nord, qui comptent y gagner facilement de l’argent en affectant de vastes étendues à la monoculture d’arbres tels que les eucalyptus et les pins. Les entreprises sont surtout attirées par les bas prix de la terre et de la main-d’œuvre, par les normes environnementales souvent moins rigides et par la productivité à l’hectare considérablement plus élevée que, par exemple, celle d’Europe. Ces conditions si avantageuses sont la conséquence de la disponibilité de sols fertiles et d’eau, et de l’existence d’un climat favorable.

Or, du fait de ces caractéristiques, les terres fertiles auxquelles s’intéressent les entreprises de plantation dans les pays de l’Est et du Sud de l’Afrique font souvent partie des territoires qui permettent à la population de subsister en cultivant des produits alimentaires et de gagner leur vie en approvisionnant les marchés locaux. Ainsi, la transformation de ces terres en plantations industrielles aboutit en général à des conflits fonciers, les communautés s’opposant à l’invasion de leurs territoires.

Malheureusement, les gouvernements des pays d’Afrique de l’Est et du Sud, au lieu de défendre les intérêts des communautés rurales, facilitent l’accès des entreprises de plantation aux terres fertiles, bien que, le plus souvent, ces terres soient utilisées et gérées par la population locale. Dans de nombreux cas, la création de plantations d’arbres a provoqué le déplacement immédiat ou graduel de communautés entières. Lorsque les habitants réussissent à résister et à défendre leurs foyers mais perdent leur territoire au profit d’une plantation industrielle, ils s’aperçoivent, tôt ou tard, que leur disponibilité d’eau n’est plus la même. L’expérience acquise au fil des ans par l’Afrique du Sud, où les grandes plantations industrielles d’eucalyptus et de pins ont gravement atteint les réserves d’eau du pays, est un exemple préoccupant et très didactique. La consommation excessive d’eau que font les plantations d’arbres en régime de monoculture est encore plus inquiétante dans le contexte du changement climatique et de la très longue période de sécheresse que de vastes zones de la région ont récemment subie. D’autre part, les entreprises et les gouvernements promettent des possibilités de travail aux communautés concernées par les plantations industrielles d’arbres. Pourtant, les emplois qui se matérialisent sont en général temporaires et mal payés, et ne compensent pas la perte simultanée de sols agricoles et de souveraineté alimentaire. Les conséquences déjà graves des plantations industrielles pour la population en général le sont encore plus pour les femmes qui, dans bien des cas, sont les responsables de la production d’aliments et de l’approvisionnement en eau.

Les nombreux effets négatifs des plantations n’empêchent pas les entreprises de les faire certifier. Le FSC (Forest Stewardship Council) est un des systèmes de certification les plus utilisés par cette industrie. Pour les entreprises, la certification est un atout puissant, puisqu’elle atteste que leurs plantations sont « durables », autrement dit, qu’elles ne portent atteinte ni aux communautés ni à leurs droits. Or, c’est le contraire qui est vrai dans bien des cas, et même dans la plupart des cas où de grandes plantations industrielles d’arbres ont été établies. La certification est devenue une condition préalable importante pour les entreprises qui veulent obtenir des fonds des investisseurs financiers du Nord. Néanmoins, les communautés touchées par des plantations certifiées par des sociétés conseil agrées par le FSC (et payées par les entreprises concernées) sont confrontées aux mêmes problèmes qu’avant, parce que le FSC ne considère pas le caractère industriel et à grande échelle de ces plantations, ni les conflits fonciers non résolus qu’elles ont suscités, comme des obstacles à la certification. Pourtant, ces caractéristiques sont justement les causes principales des effets négatifs des plantations. En fait, les entreprises tirent avantage du FSC qui leur permet de donner une image brillante, mais fausse, d’une réalité bien plus sombre. C’est ce tableau idyllique de « durabilité » qui leur permet d’obtenir l’argent des investisseurs et de continuer à s’agrandir.

Parmi les nombreuses entreprises qui développent des plantations d’arbres à grande échelle dans les pays africains de l’Est et du Sud, nous souhaitons mentionner deux en particulier : la société norvégienne Green Resources (GR), et Portucel Moçambique, propriété de la société portugaise The Navigator Company. GR a des activités dans plusieurs pays de la région. La raison de distinguer ces entreprises est qu’elles sont parmi les plus actives dans la région. De ce fait, leurs activités sont en train d’avoir déjà de graves effets négatifs sur les communautés locales, et ces effets vont s’aggraver encore si l’on ne met pas un frein à l’expansion qu’elles ont annoncée.

Green Resources a des activités au Mozambique, en Tanzanie et en Ouganda. Au Mozambique elle a acquis, entre 2005 et 2009, des droits d’exploitation sur 264 898 hectares dans trois provinces, Nampula, Niassa et Zambézie. À ce jour, près des 10 % de cette superficie ont été plantés, surtout à proximité des villages, des routes principales et des ressources hydriques qu’utilise la population. Contrairement à ce que les entreprises et les gouvernements annoncent habituellement, aucune terre marginale ou dégradée n’a été utilisée. Toutes les communautés visitées au cours d’une enquête sur le terrain (dont les résultats figureront dans un rapport qui sera publié ce mois de septembre - 1 ) ont formulé des plaintes diverses, qui vont des fausses promesses concernant les bénéfices à l’accaparement de terres.

De son côté, Portucel Moçambique a annoncé la construction d’une énorme usine de pâte à papier et elle est donc en train d’étendre ses plantations industrielles d’arbres, son objectif étant d’occuper une superficie de 356 000 hectares dans le centre du Mozambique, dans les provinces de Zambézie et de Manica. Bien que seule une petite partie de cette surface ait été plantée à ce jour, des conflits ont déjà éclaté avec les communautés locales, surtout en raison des insuffisances du processus de consultation, des fausses promesses d’emploi et d’amélioration du niveau de vie, de l’accaparement de sols fertiles qui concurrence la production alimentaire, de l’absence de compensation appropriée pour la terre perdue, et de la diminution de l’eau disponible par suite de l’établissement des plantations.(2)

Les habitants d’Afrique centrale et du Sud qui, du fait de la création des plantations de GR, de Portucel et d’autres encore, ont perdu le contrôle de leurs territoires et se retrouvent assiégés par ces plantations, luttent souvent contre cette situation. Dans bien des cas, ils le font sans aucune aide extérieure ou presque, et leurs combats restent donc invisibles. Or, de plus en plus de populations vont se retrouver dans la même situation par suite de plusieurs grands projets, dits « de reboisement », qui ont été présentés ces dernières années, comme l’Initiative pour la restauration des paysages forestiers africains (African Forest Landscape Restoration Initiative, AFR100).

L’AFR100 fut lancée en France l’année dernière, en parallèle avec la conférence sur le climat. L’initiative dispose d’un milliard de dollars de la Banque mondiale, en plus des contributions d’autres bailleurs de fonds publics et privés. Le projet est censé contribuer à atténuer le changement climatique et améliorer le niveau de vie. Cependant, les exemples de projets de « reboisement » directifs et à but lucratif que la Banque mondiale et la FAO ont encouragés dans les pays du Sud au cours des dernières décennies (et l’AFR100 semble avoir les mêmes caractéristiques) montrent que le résultat habituel est la multiplication des grandes plantations industrielles d’arbres, avantageuses pour une poignée de transnationales, de fonds d’investissement et de sociétés conseil, mais dangereuses pour la grande majorité des communautés rurales qui vivent dans les zones visées par ces plans. Par suite de ces initiatives, la population se retrouve sans terre, sans nourriture et sans eau.

À l’occasion du 21 septembre, Journée internationale de lutte contre la monoculture d’arbres, les organisations, groupes, mouvements et individus signataires de la présente lettre, nous manifestons notre solidarité avec les communautés qui résistent à l’expansion des plantations industrielles d’arbres. Nous exigeons que Green Resources, Portucel et toutes les autres entreprises et investisseurs qui sont en train d’accaparer ou de prévoir l’accaparement de terres agricoles fertiles pour les affecter à la monoculture d’arbres dans les pays d’Afrique de l’Est et du Sud restituent ces terres aux communautés. Ce faisant, ils contribueront à éviter de nouveaux conflits et à résoudre les nombreux conflits qui déjà existent dans toute la région entre les entreprises et les communautés. Nous exigeons du gouvernement du Mozambique qu’il fasse respecter la législation foncière du pays et les droits de la population à la terre, à l’eau et à l’alimentation.

21 septembre – Les plantations ne sont pas des forêts !

1 - Livaningo, União Nacional dos Camponeses, Justiça Ambiental, 2016 (non encore publié); Estudo sobre “o Avanço das Plantações Florestais sobre os Territórios dos Camponeses no Corredor de Nacala: o caso da Green Resources Moçambique”.
2 - Justiça Ambiental, 2016 (non encore publié). O processo de acesso à Terra e os direitos das comunidades.