La résistance populaire au Congrès forestier mondial

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Le XIIIe Congrès forestier mondial (CFM) vient d’avoir lieu à Buenos Aires, en Argentine, du 28 au 23 octobre.
L’histoire de ces congrès commence en 1926 à Rome. Il s’agit de forums que l’onorganise tous les six ans dans des pays hôtes différents, auxquels assistent desreprésentants des gouvernements, de la société civile, du secteur privé et d’universités.
Il existe un rapport étroit entre ces congrès et la FAO, dans la mesure où cette dernière participe à leur préparation en définissant le programme, les orateurs et les auteurs à inviter, ainsi que le comité consultatif d’experts. Le congrès formule des recommandations qui peuvent être adoptées par la FAO, avec tout le poids et toute l’influence que cela implique.
L’ouverture du XIIIe CFM a coïncidé avec l’arrivée à Buenos Aires de centaines de représentants de mouvements autochtones et paysans et d’organisations sociales du Chili, du Brésil, de l’Uruguay, du Paraguay et de nombreuses provinces argentines. Accueillis par La Vía Campesina et les Amis de la Terre Argentine, des centaines d’hommes et de femmes, parfois accompagnés de leurs enfants, ont participé pendant trois jours à des journées d’échanges et de formation ainsi qu’à des concentrations et des marches.
Le 16 octobre, Jour de la souveraineté alimentaire, ils ont marché du ministère de l’Agriculture à Plaza de Mayo où ils se sont concentrés pour lire une déclaration et installer une foire de semences indigènes. Parmi les revendications populaires figurent la souveraineté alimentaire, l’arrêt du déboisement et la réalisation d’une réforme agraire qui garantisse aux communautés la possibilité de vivre et de produire dans leurs terres. L’agriculture familiale et paysanne se retrouve coincée et expulsée de la campagne par l’agro-industrie qui inclut les plantations industrielles d’arbres.
Le dimanche 18 ils se sont donné rendez-vous à Plaza Italia pour le Festival des ‘Peuples qui vivent avec les Forêts’. Accompagnée de musique, de chants et dedanses, une manifestation bigarrée et énergique est arrivée jusqu’aux portes du local proche où avait lieu le CFM, portant des pancartes où on pouvait lire des mots d’ordre du genre « Les plantations ne sont pas des forêts », « Oui à la diversité productive, non à la monoculture d’arbres », « Résister à l’agro-industrie », «Souveraineté alimentaire », « Terre, eau et justice ».
L’introduction des plantations industrielles d’arbres en Argentine s’est accélérée depuis 2006 avec l’approbation de la loi nº 25080 qui prévoit des subsides pour cette activité. L’ambiance commerciale de ce congrès est palpable dans l’énoncé même des tournées d’affaires qui figurent dans le programme officiel ; en outre, celui-ci consacre une section aux « forêts plantées ».
Ainsi, le congrès peut être la plate-forme idéale pour l’expansion de cette industrie, légitimée par les intellectuels et cachée derrière la devise « Développement forestier, équilibre vital ». Le terme « forestier » met sur le même plan des choses aussi dissemblables que les écosystèmes forestiers, richissimes en diversité biologique, et les plantations d’arbres en régime de monoculture, ces « déserts verts ».
Pour les « peuples qui vivent avec les forêts », présents au festival et à la marche, il n’y a pas de confusion possible. Ils ont une idée très claire de la valeur des forêts quileur donnent la vie et la subsistance et ils sont douloureusement conscients des répercussions des plantations forestières : elles leur font perdre l’eau, les territoires, la diversité biologique, la souveraineté alimentaire, leurs savoirs et, par voie de conséquence, leur culture, leur identité, leur vie.
C’est pourquoi ils ont dit avec beaucoup de force et de fermeté aux participants au CFM :
NON à la monoculture d’arbres mais OUI à la défense de la vie OUI aux territoires gérés par les peuples autochtones et les communautés paysannes OUI à l’agriculture orientée à la souveraineté alimentaire OUI aux connaissances traditionnelles de nos peuples Dans leur déclaration ils ont affirmé :« La lutte contre les plantations d’arbres est aussi une célébration de la vie, de l’agriculture fondée sur la diversité et pratiquée par les petites familles d’agriculteurs paysans et indigènes, de la restauration de la forêt par les paysans et les autochtones et de tant d’autres solutions réelles. En cette journée de lutte contre les plantations d’arbres, cette célébration de la vie et de la résistance nous rapproche dans notre marche vers la construction d’un monde nouveau.
NOUS VIVONS DE LA FORÊT, AVEC LA FORÊT, POUR LA FORÊT... NOS VOIX
S’ÉLÈVENT CONTRE VOS PLANTATIONS »